« La répartition géographique des opérateurs économiques » … ou comment remettre en avant la volonté d’engager une préférence géographique dans les marchés publics. Il y a une volonté récurrente de favoriser le tissu économique local, et au-delà le tissu économique national.

Cette question revient régulièrement, rappelons-nous il y a un an le gouvernement était déjà interrogé sur une éventuelle modification du Code pour permettre la prise en compte d’un critère géographique dans les marchés. (Voir notre article « Quelle place pour la préférence locale dans les marchés publics ? »)

Si la réponse est toujours négative cela n’a pas empêché quelques mois plus tard de voir émerger une nouvelle proposition de loi. Cette fois, c’est le contexte de la crise sanitaire qui a motivé cette proposition qui tente d’inclure ce critère géographique dans la passation des marchés. (Voir notre article « Le critère géographique fait à nouveau parler de lui, cette fois dans une proposition de loi ! »)

A présent, le gouvernement est une nouvelle fois interrogé. Il est toujours question de favoriser les entreprises en fonction de leur situation géographique, mais cette fois, à l’échelle du territoire national.

Quand on veut favoriser les entreprises françaises…

La question reprend ce qui a été rappelé cette année, à savoir qu’un tel critère géographique contrevient aux principes constitutionnels de la commande publique et aux principes de non-discrimination et de liberté de circulation des personnes.

Son auteur indique que de nombreux opérateurs économiques appellent toutefois à « renforcer le critère géographique dans l’attribution des marchés publics afin que l’État soutienne davantage les entreprises implantées en France, qui participent à la création et à la distribution de richesses nationales ».

In fine « il faut renforcer les mécanismes de préférence locale pour l’attribution des marchés publics ». La question est donc la suivante, quelles sont les données concernant la répartition géographique des opérateurs économiques retenus, ainsi que la taille de ces entreprises ?

Le gouvernement rappelle que ces données sont celles du recensement (dont le guide vient d’ailleurs d’être mis à jour), réalisées par l’Observatoire économique de la commande publique. Les estimations européennes montrent que le nombre de marchés publics attribués directement à une entreprise étrangère au pays de l’acheteur oscille en moyenne entre 1% et 3%. Néanmoins cela ne garantit pas que la valeur ajoutée liée à l’achat public soit réalisée majoritairement sur le territoire français, ni même sur le territoire européen…

Aussi le gouvernement précise que « c’est au niveau européen qu’il faut agir pour assurer la loyauté des conditions de concurrence dans le marché intérieur et obtenir plus de réciprocité et de loyauté de la part des pays tiers qui accèdent aux marchés publics de l’Union européenne ».

Il est déjà possible, via le droit de la commande publique, de mettre en œuvre des politiques d’achat public favorisant le développement économique et l’innovation des entreprises françaises et européennes.

… Il faut aussi considérer les entreprises européennes !

La réponse du ministère insiste sur l’étendue européenne. Il faut favoriser les entreprises françaises ET plus largement les entreprises européennes.

Cela tient en trois idées : plus de sourcing, plus d’allotissement, et la considération des enjeux de développement durable.

Le sourcing : Il est important que les acheteurs publics connaissent bien la richesse de l’offre européenne et française par le recours à un sourcing précis. Ils peuvent formuler leurs besoins selon des spécifications techniques et des conditions d’exécution qui visent à promouvoir les offres de qualité, innovantes, protectrices de l’environnement, domaines dans lesquelles les entreprises françaises et européennes sont très compétitives.

L’allotissement : C’est un bon moyen de faciliter l’accès des petites et moyennes entreprises (PME) à la commande publique. C’est un principe qui ne connaît que quelques exceptions concernant les achats complexes ou visant à accélérer la livraison de certains ouvrages, tels des logements sociaux.

Pour améliorer cet équilibre, la loi ASAP a obligé les titulaires de marchés globaux à confier une part de leur exécution à des PME ou à des artisans. (Voir notre article « La DAJ bénit les mesures commande publique de la loi ASAP »)

La place du développement durable : Le Gouvernement veille également dans le cadre du plan de relance à ce que l’achat public participe plus efficacement au développement des entreprises, de l’emploi, et à la protection de l’environnement.

La réponse du ministère précise que les acheteurs publics seront accompagnés afin de promouvoir davantage l’achat durable au bénéfice des entreprises françaises et européennes. Le projet de loi visant à mettre en œuvre les mesures proposées par la convention citoyenne pour le climat et le prochain plan national d’action pour les achats publics durables (PNAAPD) y contribueront.

Enfin, le ministère précise qu’« au niveau européen, le Gouvernement proposera des mesures permettant de clarifier et étendre le dispositif de préférence européenne pour certains marchés de fournitures des entités adjudicatrices, de mieux défendre les secteurs stratégiques européens et de mettre au point des mesures de réciprocité plus efficaces et dissuasives ».

Alors à défaut d’une préférence locale, ou bien d’une préférence nationale… place à la préférence européenne !

QR n°30029, Répartition des marchés publics entre opérateurs économiques, réponse du 21/01/2021