Quel est le point de départ des délais d’établissement du DGD en cas de réception avec et sous réserve ?
Dans un précédent article, nous (re)faisions le point sur les différentes étapes qui jalonnent le parcours du maître d’ouvrage et de l’entreprise de travaux jusqu’à la naissance du décompte général et définitif, le fameux « D.G.D. ».
Il est à ajouter que la détermination du point de départ des différents délais de ces différentes étapes est un enjeu crucial dont le CCAG règle la question… en partie.
En effet, le CCAG distingue les réceptions dites « avec » réserve, où ce qui motive l’émission de la réserve est une malfaçon ou imperfections, des réceptions dites « sous » réserve, où ce qui motive l’émission de la réserve est soit le constat d’une prestation manquante, soit l’impossibilité de réaliser dans l’immédiat certaines épreuves.
Dans le 1er cas, la réception marque le point de départ du délai d’établissement du projet de décompte final, première pierre de « l’édifice DGD », posée par l’entreprise de travaux. Et ce, avait précisé le Conseil d’État, quelle que soit l’importance des réserves : autrement dit, même des malfaçons « très sales » ne sauraient justifier de différer le moment de régler les comptes (CE, 8 décembre 2020, n° 437983).
Dans le 2nd cas, c’est la date du procès-verbal constatant l’exécution des travaux qui restaient à réaliser, qui marquera le point de départ (v. également CE, 8 décembre 2020, n° 437983).
Le Tribunal administratif de Paris a été confronté au cas peu évident de la réception prononcée avec et sous réserve. Autrement dit, les deux dates – réception et procès-verbal de constat d’exécution complémentaire – étaient également pertinentes, et il lui appartenait de trancher sur la question de savoir si l’entreprise, qui avait transmis son projet de décompte avant la réalisation des travaux manquant, avait pu déclencher la naissance d’un DGD tacite.
Malheureusement pour l’entreprise, le TA s’appuie sur la sacro-sainte règle d’unicité du décompte[1] pour écarter la possibilité que cette réception duale puisse générer un DGD en deux parties… après quoi il ne lui reste plus qu’à rappeler que le CCAG Travaux prévoit que « la procédure d’établissement du décompte ne peut (…) démarrer qu’après l’achèvement des travaux ».
Conclusion de quoi, si une réception est prononcée au moins en partie « sous » réserve de prestations demeurant à réaliser, la procédure d’établissement du DGD ne peut valablement démarrer, et l’entreprise qui transmettrait à ce moment-là un projet de décompte final accomplirait un acte prématuré.
Un tel acte prématuré ne pouvant faire courir le délai de 30 jours dont dispose le maître d’ouvrage pour notifier le décompte général, le titulaire du marché de travaux en l’espèce ne pouvait pas se prévaloir de la transmutation de son projet en décompte général et définitif.
TA Paris, 27 mars 2023, n° 2104721
[1] À savoir que « l’ensemble des opérations auxquelles donne lieu l’exécution d’un marché public est compris dans un compte dont aucun élément ne peut être isolé et dont seul le solde arrêté lors de l’établissement du décompte général et définitif détermine les droits et obligations définitifs des parties ».