I. Les modifications substantielles, notion ambiguë sauf pour l’évidence
Les modifications substantielles du contrat. Cette expression (😱 qui pourrait être le titre d’un film d’horreur destiné à glacer le sang des acheteurs et acheteuses publi.que.s 😱) pourrait donner des malaises à certains par sa seule évocation tant elle regroupe des scénarios redoutés par les pouvoirs adjudicateurs : annulation de la passation, annulation du contrat, indemnisation…
En effet, cette notion est déstabilisante, au-delà des conséquences qu’elle entraine sur les contrats publics, par son manque de clarté : encore aujourd’hui il n’existe pas une définition explicite et répétable de ce que regroupe une modification substantielle (nous vous en parlions sur un de nos articles : « Qu’est-ce qu’une modification substantielle ? »)
De ce fait la constatation d’une modification substantielle d’un marché ou d’une concession est un contentieux juridictionnel extrêmement casuistique où l’issue peut changer du tout au tout en fonction d’un détail d’espèce.
Seuls de rares cas comme le jugement d’aujourd’hui ne laissent aucun doute sur le caractère substantiel de la modification. En effet, au cours de sa mission de conception, un maître d’œuvre (MOE) fut amené à demander à l’acheteur la modification de la valeur des travaux nécessaires par voie d’avenant débouchant à une augmentation 💲de 270%💲 par rapport au prix de base.
Le juge n’a pu ici que constater le caractère substantiel de cette modification plus qu’explicite.
II. Les conséquences de cette modification substantielle
Au regard de l’analyse évidente des faits, le juge ne pourrait que conclure à une irrégularité entachant le contrat car entrant complètement dans le prisme de l’article R. 2194-7 du code car cette nouvelle valeur de prix aurait entrainé une mise en concurrence bien différente que celle qui fut passée avec le prix de base estimé par le MOE. Ainsi nous pourrions nous attendre à une annulation pure et simple du contrat par le juge…
Or, twist final, le contrat va être sauvé ! Pourquoi ? Car sans ces travaux finalisés les enfants de la commune n’auraient aucun lieu où se rendre à la rentrée afin de débuter leur année scolaire. Les obligations de continuité du service public scolaire au regard de l’intérêt général imposent la finalisation de ces travaux peu importe le montant, peu importe l’irrégularité constaté. Cet argument est appuyé par l’application de l’article R. 2194-5 du CCP sur les circonstances imprévisibles car le MOE ayant découvert une nécessité de déconstruction imprévue d’édifice préalable aux travaux amenant un bon gigantesque dans le coût de l’opération.
Tribunal administratif de Bordeaux, 1ère Chambre, 15 mai 2024 n°2204380