Le droit de la commande publique est souvent réputé – à tort ou à raison –  pour sa rigidité apparente et pour son formalisme à outrance (règles procédurales, documents et mentions obligatoires, délais contraints…).

Un formalisme et une réglementation tels, que d’aucuns pourraient se demander si la liberté contractuelle, le consensualisme voire même la commune intention des parties auraient réellement droit de cité en commande publique.

En réponse à ces détracteurs, la jurisprudence s’attache à régulièrement démontrer que ces grands principes ont pleinement leur place dans les contrats de la commande publique.

L’arrêt de la cour administrative d’appel de Nancy du 19 septembre dernier en constitue une parfaite  illustration.

Revenons rapidement sur les faits de l’espèce…

Le cahier des clauses administratives particulières (CCAP) dérogeait à l’ordre de priorité des pièces contractuelles fixé par l’article 4.1 du CCAG.

Et dans la liste des pièces contractuelles, ne figurait pas la pièce « maîtresse » du contrat, à savoir l’acte d’engagement… Sacrilège !

L’un des cocontractants qui combattait devant le juge niait donc l’opposabilité des stipulations de l’acte d’engagement, en soutenant que ce document était dénué d’une quelconque valeur contractuelle.

Et jusqu’ici, où est le rapport avec le consensualisme et la commune intention des parties ?!

… On y vient, on vient 🙂

S’il est vrai qu’une pièce qui n’est pas citée dans la liste des pièces contractuelles n’a normalement pas de valeur contractuelle et n’est donc pas opposable aux parties, la commune intention des parties ne doit pas pour autant être écartée.

A charge pour le juge de « sonder » cette commune intention des parties, pour déterminer, par-delà la lettre du contrat, quelle était la réelle volonté des cocontractants.

Dans ce cadre, le juge relève que le CCAP se référait expressément à l’acte d’engagement dans d’autres articles. Et surtout que l’omission de l’acte d’engagement dans la liste du CCAP n’a « ni pour objet ni pour effet de faire disparaître l’accord de volonté matérialisé par les signatures apposées sur l’acte d’engagement et la lettre du maire le retournant à l’entreprise ».

Cour administrative d’appel de Nancy, 4ème chambre – formation à 3, 19 septembre 2023, 21NC01615