Assurance : le courtier est-il responsable du défaut d’exécution de l’assureur, c’est-à-dire du défaut de versement des indemnités ? Et plus spécifiques, que se passe-t-il lorsque la situation financière de l’assureur se dégrade à tel point qu’il ne peut plus assumer ses contrats ?

Pour mémoire, un courtier, qui assure une mission d’intermédiation d’assurance, est placé en position de mandataire de l’assureur. Autrement dit, la fiction juridique est telle que l’assureur est réputé agir à travers lui. Cependant, il assure aussi une mission en propre à l’occasion de laquelle il peut engager sa responsabilité contractuelle.

Dans l’affaire portée devant la cour administrative d’appel de Nantes, l’acheteur-assuré avait transmis des déclarations de sinistre au courtier, mais n’avait jamais obtenu les indemnités attendues. Il se trouve que l’assureur avait été placé dès février 2018 sous administration judiciaire et s’était vu interdire de poursuivre le règlement des sinistres déclarés. De ce fait, le juge en déduit que le courtier qui a transmis des déclarations pour des sinistres se rattachant à une période postérieure (mars 2018-février 2020), les eusse-t-il transmises en retard, ce retard ne peut être à l’origine du défaut de versement des indemnités. Logique ! (D’autant qu’aucun retard de transmission n’est réellement prouvé).

L’acheteur-assuré s’était également prévalu d’un préjudice découlant d’une « dissimulation » de la mauvaise santé financière de l’assureur, faisant obstacle à sa faculté de résilier le contrat et se trouver un nouvel assureur opérationnel.

Sur ce point, le juge relève toutefois que la faute n’est pas qualifiée. En effet, bien que le courtier, alerté par l’assuré, ait soutenu que les indemnités seraient payées (« les difficultés financières de l’assureur étant présentées comme pouvant être réglées par une réorganisation de son activité »), il n’en résulte pas pour autant une faute dans la mesure où ces assertions semblent avoir été faites de bonne foi.

Bien sûr cette bonne foi n’est pas présumée. La société de courtage s’appuie pour la démontrer sur « divers documents institutionnels, tels que rapports d’activité, notation financière, certificat, quitus fiscal, de nature à démontrer qu’elle n’avait pas connaissance de la mauvaise santé financière de l’assureur et encore moins de son risque de faillite ».

Sur ce point également, le juge relève aussi, et surtout, qu’une fois connaissance acquise de la situation, le courtier avait bien informé l’assuré en octobre 2018 et lui avait notifié une résiliation à compter du 31 décembre, que l’acheteur-assuré avait lui-même refusé. Ce faisant, il ne peut plus se prévaloir d’une faute de conseil et d’information de la société de courtage.

Cour administrative d’appel de Nantes, 4ème Chambre, 22 mars 2024, 23NT00104


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