Quand une procédure est abandonnée, où commence la faute ?

Quand une procédure est abandonnée, où commence la faute ?

Quand une procédure fait l’objet d’une déclaration sans suite, où commence la faute ?

Une collectivité qui lance une concession n’est jamais obligée d’aller jusqu’à la signature. Comme pour les marchés, elle peut toujours déclarer la procédure sans suite pour un motif d’intérêt général ⚖️. (Cependant, attention à la motivation… voir notre article sur ce point).

👉 Le Conseil d’État l’a rappelé dans une décision du 15 juillet 2025 : cette liberté vaut même si le code de la commande publique ne le dit pas expressément pour les concessions.

Cela n’est pas dit expressément mais cette liberté trouve son fondement dans le principe de liberté contractuelle (CE Section. 28 janvier 1998. Société Borg-Warner) qui veut que l’on ne soit jamais tenu de contracter contre notre volonté.

Ce principe a une conséquence directe :

  • l’abandon de procédure, en soi, n’est pas une faute ;
  • les candidats évincés ne peuvent donc pas obtenir d’indemnisation au titre du contrat qu’ils n’ont pas signé (pas de bénéfice perdu 💸).

👉 En revanche, la responsabilité de l’autorité concédante peut être engagée si elle commet des fautes distinctes au cours de la procédure. Le Conseil d’État donne deux exemples parlants :

  • inciter un candidat à engager des dépenses inutiles (par exemple, préparer un permis de construire alors que rien n’est encore acquis) ;
  • entretenir l’illusion qu’un contrat sera conclu alors que la décision inverse est déjà prise dans son for intérieur.

C’est exactement ce qui s’est passé dans l’affaire jugée. La commune avait d’abord rédigé des documents de consultation en ignorant délibérément des contraintes urbanistiques, rendant toute offre inadaptée. Elle avait ensuite encouragé un candidat à constituer un dossier de permis de construire, générant des frais perdus. Ces deux comportements ont été jugés fautifs, indépendamment de la décision de déclarer la procédure sans suite.

➡️ Conséquence : le candidat évincé peut être indemnisé de ses frais et de ses préjudices liés à ces fautes. En revanche, il ne peut jamais réclamer le bénéfice attendu du contrat non signé.

 

En résumé :

  • ✅ La collectivité peut toujours déclarer une concession sans suite pour motif d’intérêt général.
  • ❌ L’abandon n’est jamais fautif en soi.
  • ⚠️ La responsabilité peut naître de fautes commises pendant la procédure (mauvaise information, incitation à dépenser inutilement…).
  • 💡 L’indemnisation couvre les frais subis, jamais le manque à gagner du contrat perdu.

 

CE, 15 juillet 2025, n° 491624