La question n’est pas nouvelle, qui en décembre dernier s’était vu répondre par la cour administrative d’appel de Bordeaux que la seule perte de confiance de l’acheteur dans son assistant maîtrise d’ouvrage (AMO) pouvait, en l’absence de tout conflit d’intérêt constitué (ou, du moins, prouvé…), constituer un motif d’intérêt général propre à fonder une résiliation du marché.

Mais dans un tel cas bien sûr, et à moins que le marché ne prévoit autre chose, l’AMO pourra obtenir des indemnités sur son manque à gagner…

C’est aujourd’hui au tribunal administratif de Montpellier, saisi de cette question, de rappeler que l’acheteur peut aussi et avant tout fonder sa résiliation sur une faute grave de l’AMO, exclusive alors de toute indemnité ! En l’occurrence, il devra établir des faits concrets, probants, permettant de faire naître un doute sérieux quant à l’impartialité de l’AMO (ce qui avait manqué dans l’affaire devant la CAA de Bordeaux).

En l’espèce, l’une des sociétés rejetées avait signalé à l’acheteur que comptait parmi les effectifs de la société attributaire… la conjointe du gérant de la société en charge de l’assistance-maîtrise d’ouvrage. Immédiatement interrogée par l’acheteur sur ce point, l’AMO a manqué à dissiper le doute sur son impartialité.

Le juge relève en particulier que

  • L’AMO n’a fourni qu’une réponse lacunaire, se bornant à indiquer que la conjointe du gérant n’occupait pas de fonction de direction, mais sans pour autant préciser lesdites fonctions au sein de la société attributaire… empêchant ainsi l’acheteur de déterminer l’influence du lien personnel en question sur l’analyse des offres.
  • De plus, il s’avérait, en définitive, que ses fonctions l’amenaient à intervenir directement dans des missions nécessaires à l’élaboration des offres.

Dès lors, « en égard à la gravité de ce manquement, la décision de résiliation pour faute n’est pas disproportionnée » !

TA Montpellier, 15 juin 2023, n° 2106747