Responsabilités constructeurs : réceptionner avantage le maître d’ouvrage !

Responsabilités constructeurs : réceptionner avantage le maître d’ouvrage !

Dans un arrêt du 30 décembre 2024, le Conseil d’État a jugé que la prescription de l’action du maître d’ouvrage qui n’a pas réceptionné les travaux, lorsqu’elle est dirigée contre son cocontractant, est de 5 ans.

Dans les faits, le maître d’ouvrage partie à l’affaire avait demandé l’arrêt du chantier après avoir constaté certaines nuisances. Cet arrêt ayant été demandé en janvier 2010 afin notamment de commanditer une expertise. La requête en indemnisation ayant été introduite en 2020, soit 10 ans plus tard, s’est naturellement posé la question de la prescription.

Or, ainsi que le rappelle le Conseil d’État, c’est la prescription civile de droit commun qui s’applique à l’action en responsabilité contractuelle dans le cas présent.

En effet, les travaux n’ayant pas été réceptionnés, la garantie décennale ne peut pas être actionnée !

Les dispositions de de l’article 2224 du code civil sont donc « applicables en l’absence de réception des travaux ».

Le Conseil d’État considère qu’il résulte de ces dispositions que la prescription qu’elles instituent « court à compter de la manifestation du dommage, c’est-à-dire de la date à laquelle la victime a une connaissance suffisamment certaine de l’étendue du dommage, quand bien même le responsable de celui-ci ne serait à cette date pas encore déterminé ».

En l’espèce, un constat d’huissier dressé dès février 2010 faisait ressortir un certain nombre de nuisances sonores en cas de vent. Le Conseil d’État en déduit que le juge du fond a pu, par son appréciation souveraine, considéré que c’est à cette date que la prescription avait commencé à courir.

Il conclut en rappelant que, si le maître d’ouvrage dispose d’une action « de secours » contre le sous-traitant lorsque la responsabilité de son cocontractant ne peut être utilement recherché, cette action n’a qu’une vocation subsidiaire et n’a surtout pas pour objet de compenser la négligence du maître d’ouvrage qui aura laissé expirer l’action principale contre son cocontractant (CE 7 décembre 2015, Commune de Bihorel, n°380419) (voir notre article « La sous-traitance de A à Z »).

CE 30 déc. 2024, CA de l’Orne, n° 491818