Une crainte récurrente parmi les acheteurs est celle de voir surgir des « sous-traitants surprises ». On les voit venir, gros comme une maison, pendant la procédure d’attribution, mais où sont donc les outils pour forcer les candidats à les déclarer avant la signature ?

Il faut rappeler certains prérequis importants.

Le 1er de ces prérequis est que la sous-traitance est une dérogation au principe de l’exécution personnelle… mais aussi un droit. Autrement dit, c’est une dérogation générale organisée par la loi de 1975 – et aujourd’hui le code de la commande publique – que l’acheteur ne peut pas limiter par simple convenance. Il peut simplement s’abriter derrière l’interdiction de la sous-traitance totale, ou bien prévoir dans son Règlement de consultation certaines tâches réservées exclusivement à l’attributaire.

Ah ! Le Règlement de consultation… Parlons-en !

Obligatoire dans toutes ses dispositions (autre prérequis), il permet à l’acheteur d’introduire des conditions de forme et de fond à la candidature des entreprises, sauf à ce que ses exigences soient directement contraires à la loi ou manifestement inutiles (Voir nos articles : « Le principe de proportionnalité dans la commande publique ? (épisode 1) »et « (épisode 2) »).

Dernier prérequis : l’entreprise candidate, lorsqu’elle s’appuie sur les capacités d’un tiers pour faire admettre sa candidature, doit évidemment prouver que ce tiers dispose lui-même de la capacité à exécuter le marché. Ce qui implique nécessairement de signaler à l’acheteur cotraitants et/ou sous-traitants.

De ce « melting pot » de rappel, tirons-en les conclusions qui s’imposent :

  1. Lorsque l’entreprise n’a pas à elle seule la capacité à exécuter le marché, elle « doit » déclarer son éventuel sous-traitant faute de quoi sa candidature sera écartée comme manifestement insuffisante.
  2. Dans tous les cas, l’acheteur peut prévoir dans son Règlement de consultation que « L’offre, qu’elle soit présentée par une seule entreprise ou par un groupement, devra indiquer tous les sous-traitants connus lors de son dépôt. Elle devra également indiquer les prestations dont la sous-traitance est envisagée, la dénomination et la qualité des sous-traitants ». Dans le cas contraire, l’offre sera écartée comme irrégulière.

Le juge fait en effet produire des effets utiles à cette dernière mention, sous réserve de pouvoir prouver que la sous-traitance est effectivement envisagée, comme dans le cas d’espèce porté devant le Tribunal administratif de Mayotte.

Des circonstances se déduisait une sous-traitance inévitable : le candidat était un autoentrepreneur, qui plus est stagiaire dans le domaine objet du marché… Selon le juge « une grande partie » du marché devrait nécessairement être sous-traitée. Or, celui-ci relève aussi que l’offre était dépourvue de toute précision concernant la sous-traitance. Dès lors, l’offre était irrégulière !

Tribunal Administratif de Mayotte, 24 octobre 2023, 2303549