Quelle analyse pour les marchés à tranches ?

Quelle analyse pour les marchés à tranches ?

Dans un précédent billet, nous partagions avec vous le sens de la décision du TA d’Amiens, 19 avril 2024, 2401015 qui s’intéressait, déjà, à la question de la méthode de notation des marchés à tranches.

Rappelons que le principe d’un marché à tranches optionnelles est que l’ensemble des prestations est réparties dans des « paquets » cohérents, appelés tranches, et que l’exécution de la seule tranche ferme est acquise au titulaire dès la notification du marché.

Les tranches optionnelles devront faire l’objet d’un ordre de service d’affermissement pour engager l’acheteur.

Dans ce cadre, l’outil tranche permet ainsi aux acheteurs de subordonner l’exécution d’une partie du marché à la réalisation d’un certain évènement (conclusions d’une étude à venir, obtention d’une subvention, sens d’une décision de justice…).

Il lui permet aussi de définir des alternatives (= TO1 et TO2 correspondent à deux scenarios(ii) qui s’excluent l’un l’autre). Ce qui pose alors la question de la méthode d’analyse du prix…

Le Tribunal d’Amiens avait jugé qu’il était loisible aux acheteurs de réduire la notation du critère prix à la seule tranche ferme du moment que cela était clairement prévu au Règlement de la consultation et que cela correspondait aux caractéristiques du marché, par exemple lorsque les tranches sont alternatives.

C’est au Tribunal administratif de Montpellier de venir préciser les choses, ajoutant – avec un bon sens à toute épreuve – que la méthode de notation du prix doit assurer une cohérence entre le nombre de points attribués à chaque tranche et le poids relatif de cette tranche eu égard au volume total des prestations du marché.

En l’espèce, l’acheteur avait définir trois tranches, dont la seule tranche ferme représentait environ la moitié du volume total. Les deux tranches optionnelles devaient être affermies avec certitude, selon l’acheteur, mais celui-ci souhaitait reporter leur exécution dans le temps.

Des sous-items de notation avaient été définis par tranche avec un nombre de points respectifs de 1000 pour la tranche ferme et de 1400 pour les deux tranches optionnelles.

Mais aux yeux du juge, la « certitude » d’affermissement n’entre pas en ligne de compte dans la mesure où l’acheteur peut toujours y renoncer ; leur réalisation reste donc tout à fait hypothétique du point de vue juridique.

Ainsi l’acheteur a défini une méthode de notation qui peut aboutir à ne pas retenir l’offre économiquement la plus avantageuse dans l’éventualité où la seule tranche ferme est réalisée, puisque « à la tranche ferme, qui représente plus des 5/9ème du montant total du marché, ne correspond que 5/12ème du total des points attribués ». Ainsi cette pondération est « manifestement inadaptée ».

TA Montpellier, ord. 7 octobre 2024, Sté Spie Citynetworks, n°2405250