Le « dites-le nous une fois » refait parler de lui !

Il était une fois, le DLNUF

Bien que déjà ancré dans les pratiques, le principe du « Dites-le nous une fois », ou le cocasse mais non moins imprononçable DLNUF est désormais finalisé avec la publication de deux décrets d’application.

Rappelons que le DLNUF est une des actions de simplification prévue dans le plan de transformation numérique (action n°6). Son objectif est simple : remédier à la lourdeur administrative qui, en marchés publics, correspond notamment à la constitution du dossier de candidature des entreprises. Le DLNUF veut donc éviter les redondances dans la communication des pièces.

Le décret relatif aux marchés publics du 25 mars 2016, dans son article 53 prévoit déjà le principe du « dites-le nous une fois » afin d’alléger la charge des entreprises dans la constitution de leur dossier de candidature. A ce titre, les candidats ne sont pas tenus de fournir les documents que l’acheteur peut obtenir (article 53 I):

  • Soit par le biais d’un « système électronique…administré par un organisme officiel » (par exemple un système automatisé tel le dispositif « MPS »)
  • Soit sur un « espace de stockage numérique » (lorsque l’entreprise met à disposition les pièces de sa candidature sur une adresse web qu’elle communique aux acheteurs, ou lorsqu’elle dépose ces documents sur le profil acheteur qui lui propose un espace de stockage).

Dans les deux cas, cette mise à disposition est conditionnée : toutes les informations nécessaires à la consultation de ces documents doivent figurer dans le dossier de candidature des entreprises. 

L’acheteur peut également prévoir que les entreprises n’auront pas à fournir à nouveau les documents déjà transmis à l’occasion d’une précédente consultation (article 53 II). En revanche, à compter du 1er avril, à savoir dès l’entrée en vigueur du code de la commande publique, cette non communication sera de droit pour les entreprises, qui n’auront plus à fournir ces documents, même si l’acheteur ne l’a pas expressément prévu (cf. Article R2143-14 du CCP).  

L’article L113-13 du code des relations entre le public et l’administration (CRPA) prévoit que « lorsque les informations ou données nécessaires pour traiter la demande présentée par une personne ou la déclaration transmise par celle-ci peuvent être obtenues directement auprès d’une autre administration […] la personne ou son représentant atteste sur l’honneur de l’exactitude des informations déclarées ».

S’il est déjà établi que l’attestation sur l’honneur remplace la liasse de documents administratifs, il ne manquait plus qu’un décret pour fixer la liste des pièces qui ne sont plus à produire par les entreprises.

L’apport des décrets du 18 janvier 2019

Le décret n°2019-33 fixe la liste les pièces que les candidats ne sont pas tenus de produire à l’appui de leur dossier de candidature, telles que par exemple :

  • L’attestation de régularité fiscale
  • L’extrait d’immatriculation au registre du commerce
  • Les attestations de régularité sociale et de vigilance
  • Le certificat attestant la régularité de la situation de l’employeur au regard de l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés

On aura ici reconnu les pièces que l’acheteur demande au titulaire pressenti pour l’attribution du marché. Et c’est à ce même acheteur qu’il appartient désormais de prendre en charge la récupération de ces pièces, directement auprès des administrations concernées.

La liste de ces administrations est définie dans le décret n°2019-31. Il s’agit du décret d’application dont il est fait état à l’article L114-9 du CRPA, qui détermine également :

  • Les domaines et les procédures concernés par les échanges d’informations ou de données,
  • Les critères de sécurité et de confidentialité nécessaires pour garantir la qualité et la fiabilité des échanges,
  • Le délai de conservation des informations et données applicable à chaque système d’échanges. 

Les acheteurs pourront ainsi demander directement à ces administrations la communication des pièces listées dans le décret n°2019-33. Ainsi, concernant par exemple la situation fiscale de l’entreprise, c’est à la DGFIP que la demande devra être adressée. L’attestation relative à la régularité de la situation de l’employeur au regard de l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés nécessitera quant à elle d’interroger l’association de gestion du fonds de développement pour l’insertion professionnelle des handicapés.

La charge de la demande de communication des attestations fiscales et sociales pèse donc désormais sur les acheteurs. C’est dans ce contexte qu’est mise en place une expérimentation pour un traitement automatisé de l’ensemble de ces données.

L’expérimentation pour un traitement automatisé

Cette expérimentation est le fruit de l’article 40 de la loi du 10 août 2018, pour un Etat au service d’une société de confiance. Cet article prévoit que « à titre expérimental et pour une durée de trois ans à compter de la publication du décret en Conseil d’Etat […], les personnes inscrites au répertoire des entreprises et de leurs établissements, qui y consentent, ne sont pas tenues de communiquer à une administration des informations que celle-ci détient déjà dans un traitement automatisé ou qui peuvent être obtenues d’une autre administration par un tel traitement ».

Le décret 2019-31 vient donc définir les conditions de cette expérimentation. Qui, quoi, quand ?

Qui
est concerné ? 

Toutes les entreprises dont le siège est basé dans l’une des trois régions que sont la Bourgogne France-Comté, la Bretagne et l’Occitanie, et ce pour toutes les procédures de marchés publics, pour ce qui concerne la constitution du dossier de candidature. Côté acheteurs, participent à l’expérimentation, « dès lorsqu’elles disposent d’un traitement automatisé », toutes les collectivités de plus de 3500 habitants et les services et administrations de l’Etat.

Quoi ?

Le traitement automatisé, via une interface nommée « API entreprises », permet d’obtenir directement les attestations fiscales et sociales. Pour disposer de ce traitement automatisé, les acheteurs doivent demander leur accès à l’API Entreprise (https://api.gouv.fr/api/api-entreprise.html).

Quand ?

L’expérimentation débute au lendemain de la publication du décret, à savoir le 21 janvier 2019, et ce pour une durée de 3 ans.

Rappelons à cet effet que le système « MPS » était déjà une forme de traitement automatisé permettant aux entreprises d’utiliser leur numéro SIRET pour la constitution de leur dossier de candidature. Toutefois ce dispositif d’envergure national prendra fin en avril 2019.

Par ailleurs, une logique similaire à cette nouvelle API entreprise a été engagée pour les demandes de subventions publiques. Celle-ci fait écho au MPS puisqu’il convient de parler de l’APS signifiant « aide publique simplifiée ». L’organisme détenteur de la subvention récupérera alors directement les informations sur l’entreprise auprès des administrations compétentes.