Dans un récent arrêt du 25 avril, le juge judiciaire qu’est la Cour de cassation a rendu une décision de portée majeure concernant les litiges en matière d’exécution de travaux publics.
On savait déjà deux choses.
D’une part, seul le maître d’ouvrage et l’entreprise de travaux sont liés par un contrat, et qui plus est un contrat de droit public, chasse quasi-gardée du juge administratif. En revanche, le sous-traitant même admis au paiement direct n’est certainement pas en lien contractuel avec le maître d’ouvrage : il n’est en lien qu’avec l’entreprise de travaux, par le biais d’un contrat qui relèvera du droit privé la plupart du temps. Et si un maître d’ouvrage délégué rentre dans la danse, le lien devient distendu à l’extrême !
D’autre part, le Tribunal des conflits des conflits a posé il y a plusieurs années une règle dérogatoire au schéma simple « conflit entre personnes privées = litige relevant du juge judiciaire » (TC, 10 janvier 2022, n°C4231). En effet, au vu de la complexité des opérations de travaux, du nombre d’intervenants, de la technicité juridique et de l’interdépendance des problématiques pouvant s’élever, le juge des conflits a décidé d’unifier la compétence au profit du juge administratif :
« le litige né de l’exécution d’un marché de travaux publics et opposant des participants à l’exécution de ces travaux relève de la compétence de la juridiction administrative, quel que soit son fondement juridique, sauf si les parties en cause sont unies par un contrat de droit privé et que le litige concerne l’exécution de ce contrat ».
Faisant sienne cette règle et l’appliquant à son cas d’espèce, la Cour de cassation a solennellement af(con)firmé que le litige s’élevant entre sous-traitant et maître d’ouvrage délégué concernant le paiement direct du premier par le second, dans le cadre de l’exécution d’un marché de travaux public, et dans la mesure où ces personnes ne sont aucunement liées par un contrat, relève du seul juge administratif.
Car, ainsi qu’elle le rappelle « les litiges relatif au paiement direct (…) impliquent que soient appréciées les conditions dans lesquelles un contrat portant sur la réalisation de travaux publics a été exécuté ».
Cour de cassation, Troisième chambre civile, 25 avril 2024, 22-22.912, Publié au bulletin