La question s’est posée devant le juge administratif de Toulouse : le pouvoir adjudicateur qui a écarté, à tort, une offre comme irrégulière, peut-il éviter la sanction de sa procédure en rapportant la preuve que le candidat n’aurait pas pu être bien classé malgré tout ?
Rappelons que dans le cadre du référé précontractuel, tout vice de procédure n’est pas susceptible d’entraîner la sanction de cette dernière. Encore faut-il que le candidat qui s’en prévaut établisse aussi qu’il a été lésé par le manquement incriminé ! (CE, 3 octobre 2008, SMIRGEOMES, n° 305420).
Notamment, le candidat dont l’offre a été – à juste titre – qualifiée d’irrégulière ne peut pas se prévaloir de vices dans la méthode de notation, quand bien même ces vices existeraient et seraient particulièrement laids…
Cette position ne tient plus bien sûr lorsque l’offre a été qualifiée à tort d’irrégulière, comme en l’espèce, car alors le candidat s’est vu privé de la chance de voir son offre analysée, classée, et peut-être retenue pour l’attribution du marché. Dans notre affaire, le pouvoir adjudicateur a tenté pour sa défense d’établir un classement fictif, à part, supposé établir que l’offre évincée n’aurait de toute façon pas pu se voir attribuer le marché.
Le juge toulousain balaie cet argument et estime que la qualification erronée d’offre irrégulière lèse systématiquement le candidat, quel qu’ait pu être son classement, ou plutôt qu’un classement fictif a nécessairement une portée différente d’un classement réel de telle sorte qu’il devient impossible de réécrire l’histoire !
En effet :
- l’analyse n’a pas été validée en commission des marchés ;
- la qualification d’offre irrégulière a privé la société de la possibilité d’invoquer des vices dans la méthode de notation et de la possibilité de demander les caractéristiques et avantages de l’offre retenue.
TA Toulouse, ord. réf. 20 mars 2023, n° 2301007
Et si l’acheteur qualifie à tort l’offre de régulière et l’analyse alors qu’elle ne l’était pas ? Cet article pourrait vous intéresser.