Une pénalité provisoire, mais qu’est-ce que c’est que cet animal ? Il ne s’agit pas d’une retenue, même si elle peut s’y apparenter par son caractère restituable.
La pratique a en effet inventé un système de pénalité à deux vitesses. Pour mémoire, le CCAP peut prévoir une pénalité qui s’appliquerait au premier retard par rapport au calendrier prévisionnel. C’est-à-dire que, sans découper son marché en délai partiel, l’acheteur prévoit que les différents délais du planning sont contraignants.
Que se passe-t-il ensuite ? Quand la pénalité devient-elle définitive ? En pratique, les pénalités provisoires deviendront définitive si
- l’entreprise n’a pas résorbé son retard à la fin du chantier ;
- ou si, tout en ayant rattrapé son propre retard, elle a perturbé le chantier et provoqué du retard chez les autres participants (CAA Nancy, 4ème chambre, 16 juin 2020, n° 18NC03021).
C’est dans ce cadre que s’inscrit le litige porté devant la cour administrative d’appel de Paris du 9 février dernier. En l’espèce, l’entreprise de travaux s’était vu infliger des pénalités provisoires… avant que son marché ne soit résilié !
Ces pénalités provisoires avaient été portées au décompte de liquidation.
Mais puisque le contrat n’allait pas se poursuivre, l’entreprise n’aurait jamais l’occasion de résorber son retard et par nécessité ces pénalités « provisoires » ne pourraient jamais être restituées.
Or, le cahier des charges du marché prévoyait le plafonnement des pénalités définitives inscrites au marché…
L’entreprise plaidait donc devant le juge administratif d’appel la méconnaissance du contrat, par infliction de pénalités définitives mais sans application du plafond prévu.
Cette argumentation n’emporte pas la conviction du juge, néanmoins. Pour lui, la frontière est claire : « Il résulte des stipulations contractuelles précitées du CCAP que les pénalités provisoires visent à sanctionner une méconnaissance du calendrier contractuel d’exécution (…) alors que les pénalités définitives visent à sanctionner un dépassement du délai de réalisation contractuel », donc global du lot.
Or, il constate que les pénalités infligées l’ont été au motif pris par l’acheteur du retard pris dans l’exécution d’une tâche du calendrier.
Selon le juge l’entreprise n’est « pas fondée à soutenir que les pénalités inscrites au décompte de liquidation correspondraient nécessairement à des pénalités dites définitives, du simple fait qu’elles seraient dues à la fin de l’exécution du contrat ou à l’occasion de l’établissement du décompte de liquidation ».
Finalement, en matière de pénalités, tout est une question de choix du motif…
Cour administrative d’appel de Paris, 4ème Chambre, 9 février 2024, 22PA04754
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