Travaux supplémentaires, tu veux ou tu veux pas ?

« Tu veux ou tu veux pas ? » Parce qu’en matière de travaux supplémentaires, si tu veux c’est bien mais si l’acheteur ne veux pas tant pis pour toi…  

Que faire quand une société a réalisé des travaux supplémentaires, qu’elle réclame son paiement, alors même que l’acheteur avait expressément refusé leur réalisation ?

Dans le cadre d’un marché de travaux relatif à l’opération de remembrement d’une commune, l’opérateur économique en charge de l’exécution a réalisé des travaux supplémentaires et a demandé leur paiement dans le projet de décompte final, pour la modique somme de 374 081 euros HT. Le solde restant du marché étant fixé quant à lui à environ 50 000 euros HT… Autant dire que les travaux supplémentaires n’étaient pas négligeables !

Sauf que voilà, l’acheteur refuse de payer pour la réalisation de ces travaux supplémentaires. La société a donc saisi le juge de première instance, qui comme le juge d’appel n’a pas fait droit à sa demande. L’affaire est ainsi arrivée jusque devant le Conseil d’Etat.

La société fait valoir que « les travaux supplémentaires ont permis de procéder à un remembrement complet, conforme aux règles de l’art de la profession, alors que le strict respect des prescriptions du marché n’aurait en aucun cas permis la réalisation d’un remembrement complet et conforme »[1].

Le rappel du principe : les travaux supplémentaires indispensables sont indemnisables

Les juges du Palais royal rappellent à ce titre le principe selon lequel le prestataire a effectivement le droit d’être indemnisé du coût des prestations supplémentaires indispensables à l’exécution du marché dans les règles de l’art.

La force de l’exception : le refus préalable de l’acheteur

Toutefois, et c’est là que la décision prend tout son sens, ce principe revêt une exception, celle du refus préalable de l’acheteur quant à la réalisation de ces prestations supplémentaires[2].

En effet, dans le cas d’espèce l’acheteur a fait savoir à la société par courrier – et avant que celle-ci ait engagé la réalisation de prestations supplémentaires – sa volonté de ne pas rémunérer les prestations supplémentaires fournies sans commande expresse de sa part et sans avenant.

Ainsi, du fait du refus express et précis de l’acheteur, et nonobstant la somme importante demandée par la société, le pourvoi de cette dernière est donc rejeté.

Cette exception se place comme un moyen pour l’acheteur d’être assuré de ne pas avoir à payer des prestations supplémentaires qu’il a expressément refusées.

CE, 27 mars 2020, Société Geomat n°426955


[1] Point 3 de la décision

[2] Point 5 de la décision