Plusieurs jurisprudences récentes s’étaient intéressées au cas du mémoire technique « trop long », et à la possibilité de l’acheteur d’encadrer cette pratique (Voir nos articles : « Le principe de proportionnalité dans la commande publique ? (épisode 1) »et « Mémoire technique : soyez directifs, ils seront brefs ! »).)

Aujourd’hui, c’est au tour du mémoire technique trop général de passer sur le grill !

Que peut faire l’acheteur face à un « mémoire technique -type » ? La tentation de la sanction est forte, mais peut-il aller jusqu’à rejeter l’offre du candidat ?

Dans l’affaire récemment jugée par le Tribunal administratif de Paris, l’acheteur avait tout simplement rejeté l’offre du candidat comme irrégulière, lui reprochant d’avoir fourni un mémoire technique insuffisamment précis et spécifique eu égard à l’objet de son marché.

Précisions à titre liminaire que :

  • le qualificatif d’irrégulier parait il est vrai douteux, face à un tel motif de rejet la qualification d’offre inappropriée paraissait plus intuitive ;
  • et surtout que le juge du référé précontractuel, ici saisi, rappelle constamment qu’il n’est pas là pour « repasser derrière l’acheteur » en portant sa propre appréciation sur le contenu des offres ; son contrôle se limite à celui de la dénaturation, c’est-à-dire qu’il vérifie uniquement que l’acheteur n’a pas manifestement lu « blanc » lorsqu’il y avait clairement écrit « noir ».

En l’espèce donc, l’entreprise se plaignait d’être victime d’une discrimination et d’une dénaturation de son offre.

Chose intéressante : elle arguait en particulier de sa « forte » expérience de la matière du marché.

Le juge parisien ne retient néanmoins pas cette argumentation. Il juge en l’occurrence que la seule « expérience forte » dont se prévaut l’entreprise ne suffit pas à établir une adéquation nécessaire entre son offre et l’objet du marché. Ensuite, et au-delà, rien en l’espèce ne démontre que l’acheteur aurait dénaturé son offre.

Le rejet est validé.

En conclusion, selon ce jugement les acheteurs vont pouvoir s’en donner à cœur joie face aux mémoires techniques rébarbatifs et copiés-collés d’une procédure à l’autre !

Mais à voir ce qu’en pensent les juridictions supérieures…

TA Paris, 5 janvier 2024, n° 2328772