Le référé provision est une procédure permettant d’obtenir rapidement le versement d’une avance sur une somme due par une administration. Cela ne nécessite pas, parallèlement au référé, une procédure devant le tribunal administratif pour obtenir un jugement sur le fond de l’affaire[1].

Pour cela l’existence de l’obligation ne doit pas être sérieusement contestable. Concrètement les éléments soumis par les parties doivent être de nature à en établir l’existence avec un degré suffisant de certitude. Dans l’hypothèse où l’évaluation du montant global de la provision est incertaine, le Juge des référés n’attribue de provision que pour la partie certaine.

Nos requérants demandent cette provision dans le cadre d’une hausse importante des prix qui engendrerait des surcoûts de production.

En l’espèce existe-t-il des sujétions imprévues ouvrant droit à indemnité ?

La base de la demande de provision, les obligations évoquées par les requérants, sont les sujétions imprévues. Ce sont des difficultés matérielles rencontrées lors de l’exécution, présentant un caractère exceptionnel et imprévisible, dont la cause est extérieure aux parties et qui ont eu pour effet de bouleverser l’économie du contrat.

La jurisprudence a en effet permis l’indemnisation sur cette base, même en marché forfaitaire, lorsque toutes ces conditions sont réunies (CE, 30 juillet 2003, Commune de Lens, 223445 ; CE, 10 juin 2022, Société Voirie Assainissement Travaux Publics, n° 451334 … ).

Concrètement les sujétions avancées par les requérants sont la crise sanitaire liée au COVID-19, puis le déclenchement de la guerre russo-ukrainienne, qui auraient entraîné une très forte hausse des prix de certaines matières premières et de l’énergie. Cela induirait un renchérissement important de ses coûts de production, d’un montant de 109 838,71 euros HT sur la période d’avril à décembre 2022.

Cependant là où le bât blesse, c’est que le contrat a été signé plus d’un an après le Covid-19, donc la condition de l’imprévisibilité n’est plus remplie.

De plus une clause de révision des prix est prévue dans les documents du contrat. Il n’est pas démontré qu’elle est insuffisante à amortir suffisamment l’augmentation des prix pour empêcher le bouleversement allégué de l’économie du contrat.

Enfin les requérants n’ont mis en avant que leurs surcoûts, sans détailler leur perte de marge nette, et ne démontrent donc pas un quelconque bouleversement de l’économie du contrat.

Les conditions pour l’indemnisation n’étant pas réunies, la provision n’est pas accordée par le Juge.

Tribunal administratif de Strasbourg, 22 août 2023, 2303425


[1] Voir notre billet « référé provision, et pourquoi pas vous ? » et l’article R. 541-1 du code de justice administrative