Fautive, la résiliation pour corriger une mauvaise mise en concurrence ?
La passation des contrats de la commande publique est un parcours semé de tant et tant d’embûches, que lorsque le pouvoir adjudicateur met le pied dans une ornière, le réflexe est prompt de vouloir – lorsque la régularisation de la procédure n’est pas possible – déclarer sans suite pour motif d’intérêt général.
Mais que faire lorsque l’irrégularité de procédure apparait à l’acheteur après que le contrat a d’ores et déjà été conclu ? Oups…
Il est certain que l’Administration dispose du pouvoir de prononcer la cessation de l’exécution d’un contrat irrégulier, et plus généralement de toutes ses décisions irrégulières. En matière de contrats, la personne publique peut ainsi faire valoir son pouvoir de résilier unilatéralement le contrat dans l’intérêt général.
Oui, mais… quid du cocontractant à qui le contrat avait été attribué ?
Rappelons, avec le Tribunal administratif de Nice, que le partenaire contractuel a droit à être indemnité des dépenses exposées dans tous les cas où le contrat est résilié sans faute de sa part.
Rappelons également que lorsque l’Administration est fautive, et que sa faute cause un préjudice à son partenaire, le partenaire a droit à être indemnisé de tous ses dommages en lien direct de causalité avec la faute commise. Toute la question étant alors : la personne publique commet-elle une faute lorsqu’elle résilie unilatéralement un contrat irrégulier par son fait ?
« Après une résiliation unilatéralement décidée au motif de l’invalidité du contrat par la personne publique, (…) si l’irrégularité du contrat résulte d’une faute de l’administration, le cocontractant peut, en outre, sous réserve du partage de responsabilités découlant le cas échéant de ses propres fautes, prétendre à la réparation du dommage imputable à la faute de l’administration ».
On ne saurait être plus clair : oui !, l’Administration ne saurait exécuter un contrat qu’elle sait irrégulier, mais dans le même temps elle commet – à l’égard du titulaire – une faute lorsqu’elle en prononce la résiliation. Cette solution, empreinte d’équité, réserve d’ailleurs le cas du « partage de responsabilités », suggérant que notamment dans le cas où le titulaire aurait sciemment provoqué ou exploité le vice de procédure, il verrait son droit à indemnité réduit ou pourquoi pas supprimé.
En l’espèce, la commune acheteuse avait analysé les offres au regard d’une décomposition de critères non annoncée dans le règlement de consultation, alors même que les sous-critères étaient « dotés d’une pondération importante ». En application d’une solution classique et souvent rappelée (voir nos articles ici, ici, et ici !), le juge reconnait une violation des principes d’égalité et de transparence.
« Dans ces conditions, au regard de la gravité entachant la régularité du contrat et de l’exigence de loyauté des relations contractuelles, c’est à bon droit que la commune (…) a pu unilatéralement en prononcer la résiliation », dans le même temps que « la société (…) est donc fondée à soutenir que l’irrégularité du contrat résulte d’une faute de la commune ».