Si une demande de participation au SAD est déposée après le lancement mais avant l’attribution d’un marché spécifique, le candidat est-il invité à soumissionner ?

Et si sa candidature est déposée juste avant le lancement, l’acheteur est-il tenu de repousser le lancement de son marché spécifique et d’examiner sa candidature au préalable ?

Dans notre Infographie d’hier, nous vous retracions les grandes lignes du fonctionnement des systèmes d’acquisition dynamique (SAD). Rappelons notamment que le principe est celui d’un système fermé, qui admet cependant la présentation et l’intégration de nouvelles candidatures en continu. Le lancement des marchés spécifiques implique l’invitation à soumissionner de tous les candidats admis à participer.

Nous aimerions tous vivre en Théorie, puisqu’en Théorie tout va bien jusque-là…

Sauf le casse-tête suivant. (Pour les plus visuels de nos lecteurs, les problématiques abordées sont illustrées par un schéma en fin d’article !)

L’invitation à soumissionner, autrement dit le « DCE-offre » complémentaire n’est pas public, contrairement au « DCE-candidature » sur la base duquel sont formulées les demandes de participation. Les textes exigent en effet une mise à disposition permanente de ces derniers (Article R2162-41 du code de la commande publique).

A priori, donc, l’aspirant participant au SAD de notre hypothèse n’est pas inclus dans le tour de table, puisqu’il soumet sa demande de participation après l’invitation à soumissionner au marché spécifique. Or, l’article R.2144-8 du code – applicable aux SAD en vertu du R.2162-49 – dispose que « l’acheteur invite simultanément et par écrit les candidats admis à soumissionner ». Il serait donc matériellement impossible de respecter la simultanéité à son égard.

Cependant une réelle question se pose dans la mesure où la Cour de justice comme le Conseil d’État admettent que toutes les règles de la commande publique doivent s’interpréter au regard des principes fondamentaux, notamment celui du libre-accès à la commande publique. C’est ainsi d’ailleurs que les marchés à procédure adaptée, hors du champ d’application de la directive, sont demeurés néanmoins soumis à des règles minimales de mise en concurrence.

Bis repetita : le principe de libre-accès pourrait justifier que le juge interprète l’article R2144-8 précité comme une garantie minimale, assurant l’égalité entre les candidats déjà admis, sans préjudice de la possibilité pour les candidats admis ultérieurement de « rejoindre la danse ».

En plus d’être soutenu par un principe fondamental du droit de l’Union, cette interprétation pourrait s’appuyer sur la philosophie même du SAD qui est de permettre le référencement continu de nouveaux prestataires afin de diversifier l’offre au maximum. L’article R2162-43 prévoyant bien que « tout opérateur économique peut demander à participer au système d’acquisition dynamique pendant sa durée de validité », autrement dit à tout moment.

Il y a cependant deux nuances importantes à apporter :

  • D’une part, le texte ne concerne en tout état de cause que la participation au SAD lui-même et non pas la participation à la procédure d’attribution des marchés spécifiques.
  • Et d’autre part, il ne s’agit en aucun cas d’un « droit » d’intégration à tout moment, puisque l’acheteur sera amené à autoriser, ou non, la participation de l’opérateur au regard des critères – objectifs – de participation qu’il a fixé dans le règlement de son SAD lors de sa mise en place.

Et ce dernier point est sans doute le plus crucial, puisque l’acheteur dispose d’un délai d’examen de ces candidatures, qui peut aller jusqu’à 10 jours, voire 15 dans des cas justifiés (Article R2162-45). Or, le délai minimum de réception des offres dans le cadre d’un MS est lui-même de 10 jours. En d’autres termes, dans les cas les plus extrêmes, l’examen de l’acheteur – de la candidature du nouveau participant – pourrait, volontairement ou non, faire obstacle à l’inclusion du nouveau candidat à la procédure d’attribution du MS.

C’est dire que si l’interprétation extensive de plus haut était retenu, il pourrait être reproché à l’acheteur son délai d’examen dont il résulterait un vice potentiel dans la procédure d’attribution du MS, voire, l’acheteur pourrait être contraint de réduire son délai d’examen des candidatures afin de permettre l’accès effectif du nouveau candidat à l’attribution du MS… y compris jusque la veille de la date limite de réception des offres ???

C’est aller beaucoup trop loin dans les obligations à faire peser sur l’acheteur. (Non pas qu’il n’ait jamais été vu, en jurisprudence, des cas comparables de mise à la charge de l’acheteur d’obligations presque choquantes par leur lourdeur et leur manque de réalisme). Il est donc fort peu probable – mais pas impossible – que les juges adoptent une position aussi sévère.

L’article R2144-8 du code devrait continuer de se lire tant comme une garantie d’égalité pour les participants admis que comme une garantie de sécurité juridique pour les acheteurs dans la définition du périmètre des candidats admis à soumissionner.

En revanche, et sans aller trop loin : est-ce que le principe fondamental de libre accès ne conduira pas à réduire les délais d’examen des candidatures de l’acheteur, ou à repousser (indéfiniment ?) la date de lancement de son marché spécifique, dans le cas où, présentée avant le lancement de l’invitation à soumissionner au marché spécifique, une candidature nouvelle pointe le bout de son nez à la dernière minute ? C’est-à-dire quelques jours avant que l’acheteur invite effectivement à soumissionner ses participants mais moins de 10 jours avant ? Casse-tête… Prudence…

Ainsi s’achève notre semaine spécialement dédiée au SAD. Nous espérons que vous avez apprécié vous remuer les méninges avec nous !


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