Parce que largement éculé par la doctrine, les recherches sur le sujet des variantes et ses déclinaisons (PSE, solution alternative etc.) laissent souvent un sentiment de trouble, voire de totale incompréhension à celui qui s’y atèle.
Osons d’ailleurs dire ici que le recours aux variantes est parfois fermé pour ce motif, et par crainte d’introduire une instabilité dans la procédure d’attribution d’un marché.
Nous allons donc tenter de prendre quelques distances avec les débats sans fin sur le sujet, et nous contenter d’exposer ce qui est, afin d’estimer le risque, et que chacun puisse « inventer la vie qui va avec ».
Je demande une PSE, j’analyse une option technique, et j’autorise les variantes avec réponse facultative à l’offre de base
Le premier obstacle à l’entrée dans le monde des offres composites est le vocabulaire : options techniques, solution alternative, variantes, prestations supplémentaires éventuelles…pour ne citer que les plus connus.
Ces nuances terminologiques ont toujours une place centrale dans les développements doctrinaux : d’un mot va découler une définition, de cette définition un régime juridique.
Mais il nous semble que la place accordée au vocabulaire a été au fil du temps surestimée…car en définitive si l’on parle de risque juridique, que disent les textes? Que dit le juge administratif?
Camoulox ! La seule obligation qui incombe à l’acheteur est en définitive la transparence à l’égard des soumissionnaires
Un premier élément de réponse peut être trouvé dans un arrêt SA test[1].
Cette décision présente le cas d’un acheteur qui a demandé à ses soumissionnaires la constitution d’une offre qui ne pouvait s’assimiler ni à une variante, ni à une option au sens des textes en vigueur.
Le Conseil d’Etat estime que cela ne rend pas pour autant la procédure d’attribution irrégulière dès lors que l’acheteur avait pris soin de préciser que :
- les solutions feraient l’objet d’une appréciation séparée,
- selon les mêmes critères,
- et que le pouvoir adjudicateur se réservait la possibilité de sélectionner uniquement l’une de ces deux solutions.
Il nous est donc loisible d’en déduire que si l’acheteur satisfait à ses obligations en matière de transparence, il est libre de mettre en place ses propres règles du jeu.
Il peut, par exemple, prévoir la faculté de renoncer à une option obligatoire en cours de procédure, si cette information avait été portée à la connaissance des soumissionnaires[2].
Mythes et légendes : aucune règle n’est imposée pour l’analyse des offres composites
La crainte, la pratique, la doctrine poussent également les acheteurs à élaborer des schémas complexes d’analyse des offres.
Un classement? Plusieurs classements? Critères communs à toutes les offres ? Ou critères spécifiques?
Là encore, il faut rappeler qu’aucune disposition législative, réglementaire, ou principe général du droit n’impose de méthode d’analyse pour les offres composites.
Ainsi, au moyen portant sur l’absence de multi classement sur des offres variantées, le Conseil estime qu’aucune disposition « n’imposait à la commission d’examiner d’abord l’offre de base puis les variantes »[3].
A contrario, bien sûr, le juge sanctionnera l’acheteur qui n’a pas porté à la connaissance des soumissionnaires le changement de critères ou de pondération lors de l’analyse des offres de base et des variantes[4].
Ce qu’il faut retenir pour votre pratique : – la terminologie utilisée pour décrire une offre composite n’a guère d’importance si l’acheteur satisfait à ses obligations en matière d’information des soumissionnaires. En revanche, les textes ne font référence qu’à la notion de variante[5]. Pour y satisfaire l’acheteur doit veiller à définir : – si la partie composite de l’offre doit être remise de manière obligatoire ou facultative ; – s’il se laisse la possibilité d’y renoncer en cours de procédure ; – de quelle manière les offres vont être analysées. En effet, aucun texte, ni aucun principe général du droit n’impose à l’acheteur une méthode d’analyse des offres composites. |
CE, 30 novembre 2018, Société Philippe Vediaud Publicité, n° 414377
[1] CE, 21 octobre 2015, n° 391311
[2] CE, 30 novembre 2018, n°414377, point 18
[3] Voyez en ce sens le point 21 de CE, 30 novembre 2018, Société Philippe Vediaud Publicité précité
[4] CE, 4 juillet 2012, Ministre de la Défense, n° 352714
[5] Voyez l’article 58 du décret du 25 mars 2016, et articles 2151-8 à 2151-11 du code de la commande publique