C’est l’histoire d’un rendez-vous manqué. L’acheteur dans notre affaire a attribué un contrat de concession aéroportuaire. Puis il a estimé que le renouvellement de la DSP devait s’accompagner d’un renforcement du contrôle de l’activité du concessionnaire. Ainsi une clause de rendez-vous en cas d’écart significatif entre le trafic prévisionnel et le trafic effectif a été ajoutée.
Qu’est-ce qu’une clause de rendez-vous ? Il s’agit d’une clause qui engage les parties contractantes à se rencontrer avant l’échéance du contrat afin de décider d’une éventuelle poursuite de leur relation.
Elle permet notamment de négocier le principe et la durée d’une nouvelle modification des prix ou tarifs, le retour aux conditions financières initiales du contrat ou sa résiliation.
L’avenant litigieux a été conclu sur le fondement de l’article L. 3135-1 du code de la commande publique afin de tenir compte du covid-19 et de ses conséquences sur les déplacements par voie aérienne.
Cet article prévoit que « Un contrat de concession peut être modifié sans nouvelle procédure de mise en concurrence […] lorsque les modifications sont rendues nécessaires par des circonstances imprévues. »
Les modifications doivent être directement imputables aux circonstances imprévisibles et ne peuvent excéder ce qui est nécessaire pour y répondre. Or, en l’espèce, l’acheteur s’est fondé sur les prévisions d’évolution du trafic aérien européen résultant d’un rapport.
Ce dernier, ancien de cinq mois à la date de conclusion de l’avenant, était basé sur l’hypothèse d’une absence de vaccin contre le Covid-19. Cependant le 15 mars 2021, un vaccin était disponible et une campagne massive de vaccination avait été lancée. Dès lors, à cette date, le scénario prévu n’était plus adapté.
Il n’y avait de plus aucune urgence à renégocier, dès le mois de mars 2021, une clause de rendez-vous ne prenant effet à la fin de l’année 2025.
Dans ces conditions, les modifications ont excédé ce qui était rendu strictement nécessaire par les circonstances imprévues de l’espèce et n’entrent ainsi pas dans le champ des modifications visées au 3° de l’article L. 3135-1 du code de la commande publique.
L’acheteur argue que les modifications en cause entraient par ailleurs dans le champ des modifications non substantielles prévues au 5° de l’article L. 3135-1 du code de la commande publique.
Les juges ne sont pas de cet avis. La finalité de la clause de rendez-vous d’assigner une obligation de résultats à la société délégataire, et l’ampleur de la diminution des objectifs prévisionnels induisent une modification substantielle.
Enfin la résiliation de cet avenant ne porte pas une atteinte excessive à l’intérêt générale, c’est donc ce qui est imposé par le juge Administratif.
Cour administrative d’appel de Bordeaux, 3ème Chambre, 23 septembre 2025, 23BX00960