Justifier sa candidature par la capacité technique d’une entreprise possédée ?

Justifier sa candidature par la capacité technique d’une entreprise possédée ?

Apporter des preuves justifiant sa capacité pleine et entière à pouvoir candidater à un marché ou à une concession est une exigence que les entreprises peuvent remplir par tout moyen. Entendu par tout moyen tant que ceux-ci satisfassent les demandes des pièces de candidatures.

Mais existe-t-il des limites à cette possibilité ? (voir aussi notre article « Qualification professionnelle : Preuve par tout moyen ? »)

I. Par tout moyen oui mais uniquement par ses propres moyens

Le jugement prend place dans un litige de concurrent évincé voulant contester l’attribution du contrat de concession pour des motifs divers et multiples, en soit rien de transcendant de prime abord.

Or, la particularité de notre affaire : afin de justifier la capacité technique de sa candidature, l’attributaire va s’appuyer sur les contrats antérieurs sur des missions de concessions similaires passés par une des sociétés dont l’entreprise s’est porté acquéreuse de l’intégralité de son capital sociale.

Le juge ne va pas retenir cette justification en affirmant qu’il n’était pas impossible pour l’attributaire de justifier sa capacité technique à répondre au contrat en s’appuyant sur l’expérience d’une de ses entreprises qu’elle possède.

Néanmoins, au regard de la personnalité juridique autonome et distincte de l’entreprise possédée par rapport à l’attributaire, il était nécessaire pour celui-ci d’apporter la preuve que l’entreprise possédée lui laisserait à bonne disposition les moyens nécessaires durant l’entièreté du délai d’exécution du contrat.

Ainsi, la preuve peut en effet être apportée par tout moyen, faut-il encore que ces moyens soient propres à l’attributaire !

II. Le secret des affaires et la nécessité de l’instruction juridictionnelle.

Le secret des affaires est un leitmotiv récurrent lorsqu’il s’agit de la transmission aux candidats évincés de données liées à l’attributaire du contrat. (voir la fiche proposée par la cada)

Or, la protection des données couvertes par le secret des affaires amenant le caviardage quasi intégral des documents liés à l’entreprises ne concerne pas la communication des pièces au juge. En effet, l’entreprise doit pouvoir apporter au juge toute preuve pour justifier des accusations que le requérant lui allègue. Des pièces caviardées ne peuvent constituer des éléments de preuves suffisants au regard de la pauvreté d’information qu’elles offrent.

Il faut que les entreprises se rassurent, le juge ne communiquera pas ces pièces sensibles au requérant. Elles lui serviront uniquement à constater la véracité de l’argumentaire de l’attributaire.

T.A. Rennes, 30 mai 2024, n°2402203