« Doc[1] », Est-ce que vous saviez que depuis l’entrée en vigueur du Code de la commande publique (voir notre article en ce sens) les acheteurs appliquent un texte législatif non ratifié ? Retour vers le futur du Code de la commande publique…

Paradoxe temporel ou incidence commune du processus législatif ?

Car le projet de loi de ratification de l’ordonnance n° 2018-1074 du 26 novembre 2018 portant partie législative du Code de la commande publique est en première lecture au Sénat depuis le 15 juin 2022 !

A priori rien d’anormal…En effet l’article 38 de la Constitution prévoit que sur habilitation du Parlement, le gouvernement peut prendre des ordonnances dans des matières relevant normalement du domaine de la Loi, pendant un délai limité. Elles sont alors prises en Conseil des ministres après avis du Conseil d’Etat, puis entrent en vigueur dès leur publication. MAIS, elles deviennent caduques si le projet de ratification n’est pas déposé devant le Parlement avant la date fixée par la loi d’habilitation !

Ou en sommes-nous alors ? Pour explications, retour dans la dimension spatio-temporel de Codification de la règlementation des contrats de la commande publique…  « Marty Mc Fly »[2], c’est parti !

Si nos « calculs sont exacts » :

  • L’ordonnance n° 2018-1074 du 26 novembre 2018 portant partie législative du code de la commande publique a été présentée en Conseil des Ministres et signée par le Président de la République le 26 novembre 2018. Le décret portant partie réglementaire du code a, quant à lui, été signé le 3 décembre 2018 par le Premier ministre.
  • Les deux textes ont alors été publiés le 05 décembre 2018.
  • Le projet de loi de ratification a donc été déposé en première lecture auprès de l’assemblée nationale le 20 février 2019 (c’est-à-dire pendant le délai maximum de 24 mois d’habilitation[3]).
  • Le CCP est ensuite entré en vigueur le 1er avril 2019

Jouant sur l’obligation du simple « dépôt » de ce projet de loi de ratification, le texte n’est donc pas « hors délai » mais toujours en première lecture sur le bureau du Sénat. Donc toujours en attente de ratification[4] ! Puis de promulgation[5]

Que se passe-t-il entre temps ?

Pendant le délai d’habilitation, la non-ratification de l’ordonnances implique que le texte n’a qu’une valeur réglementaire et ses mesures peuvent être contestées devant le juge administratif.

Et si le projet de ratification de l’ordonnance n’était pas promulgué ?

A part se dire : « Tout ça pour ça ! », serait-ce la fin du Code de la commande publique ? Un scénario qui relève plus de la science-fiction tant il est peu probable et rarissime que le texte n’aboutisse pas. Il ‘s’agit là plus d’une simple formalité, qui défie cependant toutes les lois de la temporalité !

http://www.senat.fr/dossier-legislatif/pjl21-693.html


[1] Docteur Emmett Brown dans le film « Retour vers le Futur » réalisé par Robert Zemeckis, sorti en 1985.

[2] Marty McFly est un adolescent à bord d’une machine à voyager dans le temps fabriquée par le docteur Emmett Brown.

[3] Conformément à l’article 38 de la loi du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique.

[4] Procédure par laquelle le Parlement confère force de loi aux ordonnances prises par le gouvernement dans le cadre d’une loi d’habilitation de l’article 38 de la Constitution de 1958.

[5] Acte par lequel le chef de l’État constate qu’une loi a été régulièrement adoptée par le Parlement et la rend applicable.