L’impartialité: une commission sous influence?

L’impartialité: une commission sous influence?

Pas de conflit, pas d’intérêt. Pas d’intérêts, pas de conflit. Constitue un conflit d’intérêts une situation d’interférence entre un intérêt public et des intérêts publics ou privés de nature à compromettre l’exercice indépendant, impartial et objectif d’une fonction.

Notre candidat évincé, classé quatrième, estime avoir été désavantagé. Il est question dans notre arrêt de déterminer l’influence des conseils du maître d’œuvre sur la commission attribuant le contrat public.

Une note sous-évaluée à tort

Le candidat évincé a obtenu une mauvaise note au critère  » capacité technique et financière des candidats et aptitude à conduire l’opération projetée « . La motivation de la commission est le  » sentiment général que le projet ne reposera que sur un seul homme « .

Cet argument est assez léger et non étayé et ne justifie pas une note aussi basse. Le candidat évincé est en effet celui qui justifie de la plus grande expérience en matière d’aménagement et de construction de logements sociaux.

La note n’aurait donc pas dû être aussi basse. Mais la problématique majeure est ailleurs. Les Juges abordent le rôle qu’aurait joué le maître d’œuvre, conseiller dans ce dossier.

Une influence du MOE sur la Commission?

Les Juges vont avoir une interprétation (trop ?) stricte de l’égalité de traitement entre les candidats.

Il est acté qu’un conseiller peut collaborer ponctuellement avec l’un des candidats au marché, pourvu que l’égalité entre les candidats soit préservée. Ce fait ne saurait, à lui seul, caractériser un manquement à l’impartialité de la part de ces conseils extérieurs (CE, 24 juin 2011, n° 347720). Il ne doit pas fournir à certains candidats des informations privilégiées susceptibles de les avantager pour l’élaboration de leurs offres ou restreindre l’accès au marché en définissant le besoin ou les spécifications techniques (CJCE, 3 mars 2005, Fabricom SA, aff. C-21/03 et C-34/03)[1].

 En l’espèce, les trois autres candidats, mieux classés, ont bénéficié de l’assistance du maître d’œuvre lors des négociations. Ce même maître d’œuvre est celui qui avait établi pour le compte de l’acheteur les demandes de permis de construire sur la base desquels les offres devaient être élaborées.

Nous avons donc un maître d’œuvre qui a conseillé à la fois l’acheteur et les trois concurrents de notre candidat. De ce fait les Juges considèrent qu’il y a une rupture d’égalité de traitement et que l’acheteur « a pu être influencé ». Le fait que le candidat évincé aurait librement pu être également conseillé par ce même maître d’œuvre n’est pas abordé. De surcroit aucun élément factuel sur des informations privilégiées susceptible de les avantager ou sur le contenu de cette influence n’est mis en évidence. La partialité n’est pas démontrée comme exigé habituellement dans la jurisprudence [2]. Il est donné droit au candidat évincé et une évaluation du manque à gagner est ordonnée pour qu’il puisse obtenir réparation de son préjudice.

CAA de MARSEILLE, 6ème chambre, 03/04/2023, 21MA00626


[1] Voir de façon plus large la réponse ministérielle publiée au JO le : 20/09/2016 page : 8419

[2] Voir en ce sens notre article