Obligation de vigilance du candidat, droit à l’erreur de l’acheteur ?

Obligation de vigilance du candidat, droit à l’erreur de l’acheteur ?

Chers acheteurs, le Conseil d’État vous accorde une souplesse en cas d’erreur… à utiliser avec modération !!!

Il s’agit d’un acheteur qui a rejeté les quatre offres de notre requérant. Il les a déclarées irrégulières[1] au motif qu’il avait, en méconnaissance de l’article 1.4 du règlement de la consultation, présenté une offre sur plus de deux des quatre lots du marché.

Le requérant conteste son éviction. En effet il avance que l’avis d’appel public à la concurrence, dans son article II.1.6, indiquait, contrairement au règlement de consultation, qu’il était possible de soumettre des offres sur tous les lots.

Quelles sont les conséquences d’une incohérence, induite par une erreur de l’acheteur ?

Eh bien les Juges considèrent que « cette contradiction entre les documents du marché était aisément décelable par les candidats qui ne pouvaient se méprendre de bonne foi sur les exigences du pouvoir adjudicateur telles qu’elles étaient formulées dans le règlement de la consultation, auquel ils devaient se conformer »

Nous avons ici une interprétation sévère pour le candidat, à qui il appartiendrait donc de soulever les éventuelles incohérences !

En effet cet arrêt lui impose une sorte de devoir de vigilance, notamment via les questions posées à l’acheteur : « Faute d’avoir interrogé le pouvoir adjudicateur pour lever cette ambigüité, [le requérant] ne pouvait soutenir que celui-ci avait manqué à ses obligations de publicité et de mise en concurrence en écartant ses offres comme irrégulières. »

Cela constitue le revirement d’une jurisprudence constante, dans la lignée notamment de l’arrêt du Conseil d’État, 15 avril 2005, n°273178. Dans cet arrêt, dans un cas comparable où le règlement de consultation et l’avis d’appel public à la concurrence étaient incohérents, c’est l’acheteur qui avait été retoqué au vu de la nécessité de rigueur dans la rédaction des documents. Le Conseil d’État accentuait alors la responsabilité du pouvoir adjudicateur quant à la garantie d’une information claire et cohérente pour tous les candidats.

Quelle est l’interprétation la plus pertinente de la situation ? Est-ce que notre arrêt sera confirmé par la jurisprudence ultérieure ? Affaire à suivre….

Conseil d’État, 7ème Chambre, 18 juillet 2024, 492938


[1] Voir notre infographie sur les offres non conformes