Par une décision en date du 10 novembre 2021, le Conseil d’Etat a rappelé[1] les règles d’indemnisation des biens de retour en cas de rupture anticipée d’un contrat de concession.

La notion de biens de retour est d’origine prétorienne[2]. Il s’agit, dans le silence du contrat, des biens acquis ou réalisés par le concessionnaire et qui sont nécessaires au fonctionnement du service public auquel ils sont affectés.

Le régime juridique de ces biens est singulier puisqu’ils sont réputés appartenir ab initio à l’autorité concédante, y compris si l’entreprise les a acquis avant la conclusion du contrat[3]. En d’autres termes, les biens entrent directement dans le patrimoine de la collectivité publique dès leur acquisition ou leur réalisation par l’entreprise.

Si la rupture du contrat avant son terme normal peut apparaître comme un obstacle à l’amortissement des biens de retour par l’entreprise, le concessionnaire dispose néanmoins d’un droit à indemnisation qui peut être aménagé contractuellement.

Le droit à l’indemnisation des biens de retour non amortis en cas de rupture anticipée de la concession

En cas de rupture anticipée, le concessionnaire bénéficie d’un droit à indemnisation en raison du retour anticipé des biens à titre gratuit dans le patrimoine de la collectivité publique dès lors qu’ils n’ont pas été totalement amortis.

Si l’amortissement des biens a été calculé sur la base d’une durée d’utilisation inférieure à la durée du contrat, l’indemnité allouée au concessionnaire est égale à la valeur nette comptable inscrite au bilan.

Si la durée d’utilisation du bien est supérieure à la durée du contrat, l’indemnité allouée au concessionnaire est égale à la valeur nette comptable qui résulterait de l’amortissement des biens sur la durée du contrat.

L’aménagement contractuel du droit à indemnisation du concessionnaire

Les règles de principe d’indemnisation des biens de retour non amortis peuvent être aménagées contractuellement sous réserve du respect de deux limites.

D’une part, dans le prolongement de l’interdiction pour une personne publique de consentir des libéralités[4], l’indemnité mise à la charge de la personne publique au titre de ces biens ne saurait, en toute hypothèse, excéder le montant calculé selon les règles de principe définies précédemment.

D’autre part, les stipulations contractuelles ne doivent pas conduire à supprimer ou à réduire l’indemnisation des biens de retour non amortis au cas où le concessionnaire serait une personne publique.

Conseil d’Etat, 10 novembre 2021, n°449985


[1] Les règles d’indemnisation des biens de retour en cas de rupture anticipée d’un contrat de concession avaient été récemment précisées par le Conseil d’Etat. Voir en ce sens : CE, 27 janvier 2020, n°422104.

[2] CE, sect., 29 juin 2018, n°402251.

[3] CE, ass., 21 mai 2012, n°342788.

[4] CE, sect., Mergui, 19 mars 1971, n°79962.