Si le mois de mai est souvent associé à plus de frivolité, nous avions pu suivre dans l’actualité le combat très sérieux du collectif « Action-culotté » qui, de manière symbolique et humoristique, avait fait parvenir à Matignon plus de 200 petites culottes de mécontentement faisant suite aux annonces gouvernementales au sujet de la fermeture des commerces dit « non essentiels » de lingerie (lire l’article).

Le gouvernement était ainsi sollicité de manière « rigolote, mais pas tout à fait idiote » sur le fond de solidarité et la rémunération des travailleurs indépendants qui par leurs commerces de proximité contribuent à l’économie locale faisant ainsi vivre leur commune.

Ce coup « bas » envoyé aux instances d’en « haut » aurait-il inspiré le gouvernement sur le projet de loi 4D [1], conscient que les politiques publiques doivent s’adapter aux particularités locales ?

De toute évidence, non ! Mais force est de reconnaitre que dans ce contexte de crise sanitaire, ces mesures tombent à point nommé.

Véritable « push-up » règlementaire en faveur des collectivités, ce projet de loi déposé le 12 mai au Sénat vise à adapter le droit national aux réalités locales. Des actions en 4 dimensions :

  • La déconcentration : « conforter les services territoriaux de l’Etat »
  • La décentralisation : « accroître les responsabilités conférées aux collectivités territoriales »
  • La différenciation : « permettre à chaque territoire d’adapter plus librement son organisation et son action à ses particularités »
  • La dé-complexification : « simplifier l’action publique locale »

Mettons à plat son contenu !

Composé de huit titres et de quatre-vingt-trois articles, ce projet consacre le principe de différenciation territoriale.

Ainsi les collectivités locales peuvent étendre leur pouvoir règlementaire, déléguer leurs compétences aux EPCI et faciliter la mise en œuvre du droit à pétition. Certains blocs de compétences leur sont pleinement transférés dans les domaines de la transition écologique, des transports, de l’urbanisme, du logement, de la santé, de la cohésion sociale, ou encore de l’éducation. L’action publique se veut simplifier, en accélérant le partage de données entre administrations aux profit des usagers et en améliorant la transparence des entreprises publiques locales.

Un impact en matière de commande publique est-il à prévoir ?

  • Le projet de texte prévoit un transfert de la maîtrise d’ouvrage d’opérations d’aménagement du réseau routier national revêtant un intérêt local aux régions, départements, métropoles et communautés urbaines (projets de déviation ou de contournement non prioritaires pour l’Etat).

Le Conseil d’Etat s’est prononcé sur cette mesure[2] et l’analyse comme une nouvelle dérogation à l’interdiction faite au maître d’ouvrage de déléguer ses attributions, modifiant ainsi l’article L. 2411-1 du Code de la commande publique. Il relève, par ailleurs, que les obligations afférentes à la maîtrise d’ouvrage, telles qu’elles résultent notamment de l’article L. 2421-1 du code de la commande publique, sont lourdes et représentent environ 1 % en moyenne du coût des opérations concernées. Cette charge incombant normalement à l’Etat pèsera donc sur les collectivités concernées sans compensation financière.

Autant de mesures visant à faciliter la gestion financière et locale dans un contexte qui nécessite plus que jamais d’une relance économique (les détaillants en lingerie ne diront pas le contraire…).

Mais ces objectifs de grande taille seront-ils à la mesure des collectivités locales ?

Projet de loi relatif à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l’action publique locale


[1] Projet de loi relatif à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l’action publique locale

[2] Avis du Conseil d’Etat du 6 mai 2021, assemblée générale, n° 402412, relatif à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l’action publique