L’impair du maître d’ouvrage absout-il complètement l’entreprise de son retard ? Peut-on demander la réduction des pénalités si l’indisponibilité d’un sous-traitant résulte d’un décalage de planning imputable au maître d’ouvrage ?

C’est là une question à laquelle la cour administrative d’appel de Douai a répondu… non.

En l’espèce, l’entreprise de travaux qui contestait les pénalités de retard à elle infligée avait subi une interruption de chantier, résultante de la découverte d’amiante sur ledit chantier, ayant du laisser la place à une entreprise tierce de désamiantage.

L’entreprise avait certes été informée d’un tel risque et était supposée en tenir compte dans son calendrier de chantier. Néanmoins le maître d’ouvrage s’était engagé pour sa part à réaliser des diagnostics complémentaires, que jamais il ne réalisa. Ou du moins, l’histoire ne le dit pas… Toujours est-il que cet état de fait a permis, devant le juge, d’imputer en premier lieu le retard de chantier au maître d’ouvrage.

Mais la société s’était vue imputés 130 jours de retard, auxquels les premiers juges n’ont déduit que 20 jours. Elle contestait le reste des sommes laissées à sa charge, au motif que le retard résultait de l’indisponibilité de son sous-traitant, laquelle découlait directement du décalage du planning due aux opérations de désamiantage.

L’argumentation n’était pas dénuée de bon sens, mais ne pouvait évidemment prospérer. En effet, hormis le cas d’une faute du maître d’ouvrage, l’entreprise ne peut s’exonérer de sa responsabilité dans le retard de chantier qu’en démontrant l’existence d’une cause extérieure, irrésistible. Or l’indisponibilité du sous-traitant n’était pas irrésistible. Elle pouvait, ainsi que le rappelle le juge, faire appel à un autre sous-traitant ou encore exécuter les travaux elle-même. Après tout, le principe n’est-il pas celui de l’exécution personnelle du marché, auquel le mécanisme de la sous-traitance ne constitue qu’une dérogation accommodant le titulaire ?

Les pirouettes de ce dernier ne s’arrêtaient pas là d’ailleurs, l’entreprise invoquant également l’existence de travaux supplémentaires de menuiserie commandés par le maître d’ouvrage et devant excuser, dès lors, le retard dans l’exécution des travaux.

Si l’argumentation parait plus prospère ici, la CAA ne s’est pas pour autant laissée attendrir, jugeant que les travaux en question étaient « d’ampleur très limitée par rapport à l’objet du marché » et qu’il « ne résulte pas de l’instruction qu’ils ne pouvaient être exécutées dans la limite du délai prévu contractuellement ». Elle déboute donc également l’entreprise de ce chef.

CAA Douai, 28 mars 2023, n° 21DA01791

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