Le juge peut-il moduler les pénalités de retard et jusqu’à quel point ? Dans un précédent billet, nous vous invitions à faire le point avec nous sur cette vaste question.

Il avait été en particulier souligné que, si le juge dispose bien d’un pouvoir de modération des pénalités excessives – et, réciproquement, d’augmentation des pénalités dérisoires –, ce pouvoir ne saurait se traduire par la sanction automatique et mathématiques de pénalités excédant un certain seuil bien déterminé de pourcentage de marché.

Entendons par là que bien que le seuil de 25% du montant du marché soit régulièrement retenu par les juges comme raisonnable, ce seuil ne peut en aucun cas être regardé comme établi. Des pénalités peuvent très bien être raisonnables et excéder ce seuil, comme elles peuvent être déraisonnables même en deçà de ce seuil (voir notre billet pour plus de précisions).

Cette absence de systématicité est à nouveau illustrée par la cour administrative d’appel de Bordeaux.

En effet, dans une affaire où l’acheteur avait passé un marché pour l’acquisition d’une solution logicielle de gestion (petite enfance, scolarité, enfance, restauration scolaire, temps de vie de l’enfant et facturation), le juge a été amené à réduire des pénalités s’élevant à plus de trois fois le montant du marché.

Toutefois, eu égard aux « souffrances » de l’acheteur (400 jours d’indisponibilités de plusieurs fonctionnalités de l’application de facturation, perte de recettes liées, nécessité de recruter trois agents pour pallier ces indisponibilités), la cour estime que sont raisonnables en l’espèce des pénalités de retard d’un montant de… 80% du montant du marché.

Ouïe !

CAA Bordeaux, 19 oct. 2022, n° 20BX02818