Quelles sont les conséquences lorsque la CAO prend une décision lors de la première convocation alors même que le quorum n’est pas atteint ?

Notre arrêt est une illustration de ce cas de figure. Les requérants saisissent le Juge du référé précontractuel pour faire annuler la procédure de passation.

Nous vous rappelions précédemment dans notre infographie les modalités de mise en œuvre de la Commission d’appel d’offres (CAO).

Elle est codifiée par le Code Général des Collectivités Territoriales (CGCT).

L’article L. 1414-2  définit les cas d’obligation de CAO pour attribution:  » Pour les marchés publics passés selon une procédure formalisée dont la valeur estimée hors taxe prise individuellement est égale ou supérieure aux seuils européens ».

L’article L. 1411-5 du CGCT dispose quant à lui que : « le quorum est atteint lorsque plus de la moitié des membres ayant voix délibérative sont présents ». Toutefois « si, après une première convocation, ce quorum n’est pas atteint, la commission est à nouveau convoquée. Elle se réunit alors valablement sans condition de quorum ».

Pour rappel l’impossibilité de vérifier le quorum revient à considérer que ce dernier n’a pas été atteint (CAA de Marseille, 18 mai 2004, n° 01MA00580,Commune d’Allauch c/Entreprise Midi‐Rénovation‐Gomez ; CE, 14 janvier 1998, Commune de Blanc‐Mesnil).

Par ailleurs les membres suppléants de la CAO à voix délibérative peuvent siéger avec les membres titulaires, pour autant que cette situation n’aboutisse pas non plus à un surnombre (CE, 8 décembre 1997, n° 162116, Société RICARD; CE, 13 mars 1998, n° 173325 Syndicat intercommunal d’adduction d’eau potable du Pont du Gard).[1]

En l’espèce, au vu de la feuille d’émargement de la séance de la CAO, sur les 62 membres de cette commission, seuls 21 étaient effectivement présents.

Le calcul du quorum s’effectue exclusivement au regard du nombre de membres effectivement présents, les membres représentés par un mandataire auquel ils ont donné une procuration ne comptant pas.

Cela rejoint le principe énoncé dans la réponse ministérielle apportée par Bercy le 22 mai 2012 actant qu’ « Aucun texte n’envisage la possibilité de considérer que les membres qui participent à l’assemblée par visioconférence sont réputés présents pour le calcul de ce quorum. Cette possibilité n’est en conséquence juridiquement pas admise. » Le parallèle avec les membres représentés par mandataire est donc cohérent.

In fine cette irrégularité constitue un manquement aux obligations de mise en concurrence. Cela a pu avoir une influence sur l’attribution des marchés litigieux et donc est de nature à avoir lésé la société requérante pour l’ensemble des lots pour lesquels elle a déposé une offre. Le Juge enjoint en conséquence l’acheteur à reprendre la procédure au stade de l’analyse des offres.

TA Rennes, ord. 17 juillet 2023, Sté Sysco France, n°2303345


[1] Voir également réponse à la Q n° 11081 de M. Dominique Richard, JO AN du 10/03/2003 ; réponse à la Q n° 17172 de M. Michel Billout, JO Sénat du 02/06/2011.