Nous avons en France le principe de dualisme juridictionnel. Ce sont l’ordre administratif et l’ordre judiciaire, ayant à leur sommet respectifs le Conseil d’État et la Cour de cassation. En principe, le juge judiciaire traite des litiges opposant des personnes privées et le juge administratif est compétent pour les litiges relatifs à l’administration. Néanmoins les dérogations légales, constitutionnelles et jurisprudentielles sont nombreuses.

Une juridiction a même été créée afin de prévenir les dénis de justice en cas de contrariété de décisions définitives rendues, dans le même litige, par une juridiction de chacun des deux ordres. Il s’agit de décisions contre lesquelles aucune voie de recours ordinaire ne peut plus être exercée. Le Tribunal des Conflits intervient alors pour résoudre les conflits de compétence[1].[2]

Dans notre arrêt de la Cour d’Appel de Paris du 31 mars 2023, nous n’en sommes pas à ce stade, notamment car un appel est encore possible.

La responsabilité recherchée en application d’un contrat administratif

Le défendeur était lié à une commune dans le cadre d’un contrat de dépannage et d’entretien du matériel de restauration, parmi lequel figurent les fontaines à eau. Suite à la rupture du branchement de l’une de ces fontaines et au dégât des eaux subséquent, l’assureur de la commune saisit la juridiction administrative.

Les Juges en première instance ont considéré à tort que le recours était adressé à l’assureur du titulaire au titre de ses obligations de droit privé.

C’était cependant une simple demande annexe d’indemnité, les conclusions étaient bien dirigées exclusivement contre le titulaire.

L’assureur de la commune signataire du contrat attaque non pas l’assureur du titulaire mais celui-ci directement. Ce contrat est administratif. Or l’Article 2 de la Loi MURCEF du 11 décembre 2001[3] dispose que « Les marchés passés en application du code des marchés publics ont le caractère de contrats administratifs. Toutefois, le juge judiciaire demeure compétent pour connaître des litiges qui relevaient de sa compétence et qui ont été portés devant lui avant la date d’entrée en vigueur de la présente loi ».

Le Juge Administratif est donc bien compétent pour statuer sur ce litige.

Cour administrative d’appel de Paris, 4ème chambre, 31 mars 2023, 22PA01579


[1] Voir en ce sens notamment l’article 32 du Décret n° 2015-233 du 27 février 2015 relatif au Tribunal des conflits et aux questions préjudicielles

[2] Voir la question de la compétence pour les transactions dans notre article « et si on transigeait ? »

[3] Loi n° 2001-1168 du 11 décembre 2001 portant mesures urgentes de réformes à caractère économique et financier (MURCEF)